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Le point sur : l’UE, les Directives anti-blanchiment (LCB) et la mise en œuvre de la transparence des bénéficiaires effectifs

Réglementations Articles

La publication des « Panama Papers » en 2016 a révélé au grand public comment des structures juridiques et commerciales complexes peuvent servir à dissimuler des fonds illicites et des pratiques financières potentiellement non éthiques et néanmoins légales. Depuis, le Groupe d’action financière (GAFI), organisme international chargé d’élaborer des politiques de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB/FT), a encouragé ses membres à redoubler d’efforts pour renforcer la transparence. L’un des moteurs mondiaux de ces initiatives, l’Union européenne (UE) a introduit et développé dans le cadre de ses quatrième et cinquième directives anti-blanchiment (« 4AMLD » et « 5AMLD », adoptées respectivement en mai 2015 et en juin 2018) des registres des bénéficiaires effectifs (RBE) pour les personnes morales, les trusts et autres constructions juridiques.

Si la mise en place des RBE a permis de gagner un peu en transparence, la portée, la fiabilité et l’accessibilité des informations qu’ils contiennent continuent, de l’avis des critiques, à poser des problèmes majeurs dont les principaux sont abordés dans le présent article.

Que disent les 4ème et 5ème directives LCB sur les bénéficiaires effectifs ?

La définition du « bénéficiaire effectif » est précisée à l’article 3 (6) de la 4ème directive LCB.

Dans le contexte des sociétés, est considérée comme bénéficiaire effectif une personne physique (un individu par opposition à une entreprise ou une autre entité) qui détient ou contrôle 25 % ou plus des actions ou des droits de vote. Les directives ont également élargi cette définition en permettant de traiter les hauts responsables comme des bénéficiaires effectifs lorsque la participation de contrôle ne peut être déterminée. Les bénéficiaires effectifs des trusts et autres constructions juridiques similaires peuvent être les constituants, les trustees, les protecteurs ou les bénéficiaires.

La 4ème directive LCB a exigé des États membres de l’UE qu’ils mettent en place des RBE centraux pour les sociétés avant sa transposition en droit national le 26 juin 2017. Elle leur impose par ailleurs de rendre ces informations accessibles aux cellules nationales de renseignement financier (CRF) – des organismes publics chargés de recevoir les déclarations d’activités suspectes du secteur privé – ainsi qu’au grand public lorsqu’il y a un intérêt légitime.

Inspirée des règles sur les bénéficiaires effectifs énoncées dans la 4ème directive LCB, la 5ème directive LCB demande notamment aux États membres de veiller à ce que les RBE nationaux soient accessibles au public et interconnectés à l’échelon européen pour faciliter le partage d’informations entre les autorités des États membres.

En outre, la 4ème directive prévoit la mise en place de RBE pour accéder aux informations sur l’identité des titulaires de comptes bancaires, de comptes de paiement et de coffres-forts. Contrairement aux RBE des sociétés, qui sont accessibles au public, l’accès à ces informations en partie confidentielles est exclusivement réservé aux autorités.

Difficultés liées aux registres des bénéficiaires effectifs

Malgré les dispositions de la 5ème directive LCB imposant aux États membres de rendre leurs RBE accessibles au public au plus tard en janvier 2020, 17 pays sur 27 n’étaient pas en règle à la date d’échéance. En dépit des progrès accomplis en 2020, une certaine disparité a été constatée entre les modèles adoptés, certains États membres ayant mis en place des RBE qui ne répondent pas aux normes définies dans les directives LCB.

Difficultés d’utilisation des RBE nationaux

Accès payant aux informations sur les bénéficiaires effectifs

En Autriche, en Suède, en Irlande ou encore en Finlande, l’accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs est payant pour le public. Même si les montants sont globalement symboliques, le fait de monnayer l’accès à ces informations est dénoncé par certains comme un obstacle potentiel pour les sociétés qui ont besoin de multiplier les accès. Par souci de transparence et dans l’esprit des règles sur les bénéficiaires effectifs énoncées dans les directives LCB, ces informations ne doivent pas être verrouillées en accès payant.

Obligation de s’identifier pour accéder aux informations

Dans certaines juridictions de l’UE dont la Grèce, la Belgique ou encore la Croatie, l’accès aux RBE est conditionné par la communication d’un numéro national d’identification réservé aux citoyens ou aux résidents, ce qui pose problème. En effet, puisque que ce type de numéro n’est pas attribué aux citoyens n’appartenant pas à l’UE par exemple, les registres ne peuvent pas être considérés comme « accessibles au public » comme le stipule la 5ème directive LCB.

Connaissance préalable du numéro d’identification fiscale

En Pologne et au Portugal, le numéro d’identification fiscale de la société concernée est indispensable pour accéder aux RBE. Cette procédure est problématique puisque cette information n’est pas facilement accessible au public.

Informations inexactes ou non vérifiées

Dans son rapport 2019 sur les meilleures pratiques sur l’identification du bénéficiaire effectif des personnes morales (« Best Practices on Beneficial Ownership for Legal Persons »), le GAFI a inventorié les principaux problèmes associés aux RBE nationaux. dont le plus édifiant est que les RBE centralisés contiennent souvent des informations inexactes ou non vérifiées, une situation que le rapport explique par différents facteurs :

  • Les informations déclarées au registre sont autocertifiées par les entités qui les soumettent, sans faire l’objet d’un contrôle ou d’un audit indépendant.
  • Les systèmes d’information ne sont pas interconnectés et ne « se comprennent pas ». Par exemple, les données du RBE ne sont pas forcément recoupées avec d’autres sources telles que des documents fiscaux et juridiques.
  • En l’absence d’un dispositif de suivi ou de mise à jour, les informations du RBE peuvent être obsolètes.

Difficultés au niveau des États

Dans l’ensemble, les États membres ont été lents à mettre en œuvre les exigences définies dans la 5ème directive contre le blanchiment, notamment par manque de ressources. Le volume d’informations et la complexité des structures concernées sont tels que la plupart des autorités compétentes ne sont tout simplement pas en mesure de vérifier correctement les informations que soumettent les entreprises et autres entités juridiques. À l’heure où nous rédigeons cet article, la Commission européenne prend des mesures coercitives contre 22 États membres pour défaut de transposition et de mise en œuvre efficace de la directive dans les délais impartis.

Qu’en est-il pour les entreprises soumises à l’obligation de déclaration LCB/FT dans l’UE ? À l’heure actuelle, il leur est pratiquement impossible de s’en remettre aux RBE comme unique source de données fiable, comme le réclament les partisans de la transparence des entreprises. Beaucoup reste à faire pour que les registres soient adaptés à leur objectif. Le fait est que les entreprises de l’UE soumises à l’obligation de déclaration LCB/FT continueront dans l’immédiat à se tourner vers d’autres sources pour accéder aux meilleures données disponibles en matière de vigilance à l’égard de la clientèle et de connaissance du client (CDD/KYC).

La Regtech pour renforcer la transparence

La recherche des données nécessaires pour s’informer efficacement lors des phases d’intégration, de vérification et de supervision continue d’un client peut mobiliser une grande partie des forces vives des équipes chargées de la conformité. Dans de nombreuses entreprises, le personnel passe encore beaucoup de temps à procéder aux contrôles préalables en effectuant des recherches manuelles fastidieuses sur Internet ou dans différentes bases de données pour obtenir des résultats extrêmement coûteux et souvent mitigés.

Toutefois, grâce aux progrès liés aux nouvelles technologies au service de la réglementation financière (Regtech), les entreprises peuvent trouver les informations nécessaires de manière plus efficace et plus cohérente. S’appuyant sur des données soigneusement épurées, les solutions de Regtech les plus sophistiquées peuvent aider les entreprises à déchiffrer des structures d’actionnaires complexes au sein d’entités transfrontalières organisées sur plusieurs niveaux. Aussi bienvenu qu’il soit, le mouvement pour la transparence des entreprises engagé par les États ne suffit pas pour l’instant à soutenir les entreprises au niveau de l’obligation de vigilance qui leur incombe. Ces dernières doivent prendre des mesures proactives, un domaine dans lequel la technologie peut faire la différence.

Publié initialement 19 mars 2021, mis à jour 18 janvier 2024

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