L'état de la criminalité financière en 2024
Téléchargez notre feuille de route pour l'année à venir, élaborée à partir d'une enquête menée auprès de 600 responsables de la conformité.
TéléchargezDes élections nationales majeures ont lieu chaque année, mais l’année 2024 s’annonce particulièrement riche en la matière. En effet, trois des plus grandes économies du monde, les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Inde, font partie des pays qui organiseront des élections pour choisir leurs dirigeants. Cela concerne non seulement les présidents et les premiers ministres, mais aussi les assemblées législatives nationales ainsi que certaines fonctions au niveau régional et de l’État. Si l’on ne considère que les titulaires de charges nationales au Congrès américain, au Parlement britannique et à la Chambre basse du parlement de l’Inde (Lok Sabha), plus de 1 600 sièges seront en jeu.
L’ampleur du renouvellement constitue un défi de taille pour l’équipe chargée de la conformité d’un établissement en matière de lutte contre la criminalité financière. Elle doit notamment s’assurer de pouvoir gérer cette évolution de manière efficace, sans créer trop de frictions ni négliger de nouveaux risques majeurs. Notre enquête annuelle auprès de responsables de la conformité à travers le monde démontre que de nombreuses équipes Conformité anticipent ces pressions. En effet, 61 % des établissements interrogés déclarent qu’ils seront plus prudents dans la gestion des personnes politiquement exposées (PPE) au cours des 12 prochains mois, par exemple en faisant preuve d’une plus grande vigilance lors de l’entrée en relation d’affaires et en procédant à une supervision continue.
En cette année difficile, on peut raisonnablement envisager des changements dans l’approche fondée sur le risque que les établissements adoptent à l’égard des PPE, mais à condition qu’ils disposent du personnel et de la technologie nécessaires pour le faire efficacement. Dans le cadre de notre enquête, 73 % des établissements ont déclaré devoir réduire leur dépendance à l’égard des processus manuels pour gérer ce volume de PPE. Seul un établissement sur quatre a répondu que sa technologie actuelle pourrait raisonnablement gérer le volume de changements qu’il prévoit pour 2024 en termes de PPE.
En d’autres termes, de nombreux responsables de la conformité admettent le défi sans précédent que posera 2024 en matière de gestion des PPE. Mais la plupart d’entre eux admettent aussi qu’ils doivent modifier leurs processus pour s’adapter à ces risques. Cet article présente cinq domaines clés où les établissements doivent évaluer leur programme de gestion des PPE.
Le crime sous-jacent de blanchiment d’argent le plus étroitement lié aux PPE et à leurs réseaux est la corruption. La corruption figure sur la liste des 22 infractions majeures définies par l’Union européenne. C’est également l’une des priorités nationales du bureau FinCEN aux États-Unis, ce qui en fait une priorité majeure des organismes de réglementation du monde entier. 44 % des responsables de la lutte contre la criminalité financière à travers le monde ont déclaré que la lutte contre la corruption était une « priorité majeure » tandis que 44 % d’entre eux ont déclaré que cette lutte était plutôt prioritaire.
Compte tenu des changements non négligeables à prévoir au niveau des PPE, le nombre d’établissements considérant la corruption comme une priorité majeure augmentera probablement au cours de 2024. Parmi tous les signaux d’alerte liés à la corruption que les établissements doivent maîtriser, plusieurs d’entre eux se distinguent par le risque accru qu’ils représentent au moment d’échéances électorales :
Les dirigeants politiques cherchant à influencer les électeurs pour conserver le pouvoir ou distribuer des faveurs avant une défaite attendue, l’un ou l’autre des signaux d’alarme listés ci-dessus – et d’autres encore – peuvent être plus présents dans certaines régions. Vu le grand nombre d’élections que les établissements financiers vont devoir gérer en 2024, les équipes Conformité devraient planifier longtemps à l’avance et revoir leurs évaluations des risques à l’échelle de l’entreprise, en particulier dans les juridictions où les établissements sont présents et où se déroulent les élections, ainsi que les risques historiques et inhérents spécifiques à ces régions.
Il est logique que les responsables de la conformité d’un établissement connaissent mieux que quiconque le système et les processus politiques de leur pays d’origine. Mais beaucoup d’entre eux oublient souvent à quel point les systèmes, les assemblées législatives et la répartition des pouvoirs peuvent être différents, même dans des pays partageant la même langue ou fortement alignés en matière de réglementations.
Extraites de la base de données de PPE exclusive et à la pointe du marché de ComplyAdvantage, les données ci-dessous sur les classifications des PPE illustrent bien ce fait. L’écosystème américain des PPE est dominé par des fonctionnaires locaux, ce qui explique le grand nombre d’officiels élus au niveau de chaque État. A contrario, au Royaume-Uni, la répartition est plus équilibrée en raison du pouvoir plus important détenu par le gouvernement central. Quant à Singapour, petit pays au pouvoir très centralisé, la quasi-totalité des PPE sont nationales.
De plus, au-delà des structures politiques, chaque juridiction a sa propre définition d’une PPE. Par exemple, si la règle « PPE un jour, PPE toujours » s’applique à Hong Kong, ce n’est pas forcément le cas au Royaume-Uni ou en Australie.
Les établissements doivent donc considérer chaque pays où ils sont implantés sans penser que les processus ou les comportements sont similaires. Les mesures de filtrage et de supervision qui fonctionnent dans un contexte spécifique peuvent, par exemple, ne pas s’appliquer correctement dans un autre contexte, que ce soit en acceptant des PPE sans procéder à des vérifications supplémentaires ou, a contrario, en créant des tensions inutiles et disproportionnées par rapport au risque que représente telle ou telle personne.
En raison de la nature même de leur rôle, les PPE ne sont pas des individus faciles à filtrer et à surveiller, un défi qui est exacerbé en période électorales lorsque les personnes assument des responsabilités qui peuvent créer ou éliminer des risques. Aussi, comment les établissements peuvent-ils appliquer une technologie et des systèmes unifiés à l’échelle mondiale tout en autorisant une certaine flexibilité ? Une suite de technologies associées à l’intelligence artificielle (IA) est indispensable.
Pour ce faire, les établissements doivent exploiter tout un éventail d’informations collectées auprès de nombreuses sources. Il s’agit notamment de données provenant directement du client ou qui sont issues des activités bancaires du client, de médias défavorables identifiés au moyen d’un filtrage des informations médiatiques négatives, de sources tierces ou d’autres données comportementales. La couverture médiatique négative fait partie intégrante de cet ensemble de sources, plus particulièrement pour répondre à l’obligation de vigilance accrue dans le cadre de l’entrée en relation d’affaires avec un client et de la supervision continue de ce dernier. En outre, les analystes doivent s’assurer de bien comprendre la finalité du compte ouvert par un client, la provenance de ses fonds et l’origine de sa richesse ainsi que les flux entrants et sortants escomptés pour ce compte.
Nombreux sont les établissements financiers qui omettent de créer des politiques globales de déclassement et de renoncement à la clientèle, préférant concentrer leurs politiques LCB sur l’entrée en relation d’affaires avec la clientèle. Or, il est également essentiel de déterminer quand, et comment, un client doit être radié, en fonction de l’appétit pour le risque de l’établissement concerné. Les autorités de régulation ont, par exemple, critiqué les banques qui n’avaient pas exclu des clients ayant des comptes dormants en raison du risque lié au fait que des clients qui auraient dû être exclus puissent effectuer des transactions. Par conséquent, les établissements ont besoin d’un processus détaillé pour déterminer quand radier un client, en s’appuyant notamment sur des critères fondés sur le risque, afin de garantir un processus homogène à travers tout l’établissement.
Des politiques exhaustives concernant l’entrée en relation d’affaires sont particulièrement importantes pour les PPE en raison de leur statut à haut risque et de la probabilité que leur fonction évolue à brève échéance. Les établissements doivent également s’assurer, le cas échéant, qu’une PPE qui quitte ses fonctions publiques, et donc considérée comme n’exerçant plus d’influence ou de contrôle, est bien déclassée et qu’un niveau de vigilance révisé lui sera appliqué pour éviter une charge opérationnelle excessive. En effet, les processus liés à l’obligation de vigilance accrue sont chronophages et nécessitent beaucoup de travail manuel.
Enfin, il est important d’admettre que, même en recourant à des processus exhaustifs d’entrée en relation d’affaires, de supervision continue, de déclassement et de radiation de la clientèle, il y a des limites à ce qu’un établissement peut accumuler tout seul en termes de granularité et d’étendue de l’information. C’est pourquoi des partenariats publics-privés concernant le partage des données sont essentiels pour que les établissements puissent élargir leur perspective et identifier plus vite les risques émergents. Cela peut notamment concerner la manière dont les PPE utilisent de la monnaie numérique, dans une juridiction où l’établissement financier n’opère pas, afin d’échapper à des mesures d’obligation de vigilance raisonnable. Connaître par avance ce type de changement peut aider un établissement à se mobiliser pour détecter ce comportement au sein de sa base de clients avant que cette activité ne se produise.
Notre enquête invite les établissements à accorder une grande importance aux partenariats public-privé. 56 % d’entre eux y participent déjà pour partager des données et des informations tandis que 39 % ont l’intention d’adhérer à ce genre d’initiative au cours des 12 prochains mois. Les établissements qui ne participent pas à ce type de programme risquent d’être à la traîne s’ils ne disposent que d’informations partielles et de ressources limitées pour s’attaquer aux nouveaux risques de manière proactive.
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TéléchargezPublié initialement 17 janvier 2024, mis à jour 25 janvier 2024
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