Alors qu’elle cherche à exercer un pouvoir politique à l’échelle mondiale, la Chine utilise de plus en plus son programme de sanctions économiques pour atteindre ses objectifs en matière de politique étrangère et économique. L’activité de la Chine en matière de sanctions reflète la volonté de Pékin de réagir aux sanctions occidentales, en particulier aux effets de la guerre commerciale américaine initiée sous la présidence Trump et aux mesures ciblées prises contre les entreprises militaires chinoises qui, selon les États-Unis, sont impliquées dans la diffusion de technologies de surveillance. Face à des régimes de sanctions occidentaux toujours plus sévères envers la Chine, le gouvernement chinois s’est aussi efforcé de gérer les effets des sanctions secondaires en pénalisant les entreprises chinoises qui se conformeraient aux restrictions imposées par des gouvernements étrangers.
Compte tenu de l’importance croissante de la Chine dans le paysage financier international, les établissements doivent maîtriser le régime de sanctions de la Chine et ses conséquences en termes de conformité.
Qu’est-ce que le régime de sanctions de la Chine ?
En réponse à l’escalade de la guerre commerciale avec les États-Unis, le Ministère chinois du Commerce (MOFCOM) a annoncé en 2019 qu’il allait introduire son propre programme de sanctions internationales et publier des désignations sur sa Liste d’entités non fiables (UEL). Selon le MOFCOM, les personnes et entités étrangères figurant sur cette UEL « portent atteinte à la souveraineté nationale, à la sécurité et au développement de la Chine » ou enfreignent « les règles économiques et commerciales acceptées au niveau international. »
Les sanctions chinoises sont imposées en vertu de la Loi sur le commerce extérieur de 2016 et de la Loi sur la sécurité nationale de 2015. La Loi sur le commerce extérieur prévoit des restrictions économiques sur les marchandises et les technologies « s’il est nécessaire de restreindre ou d’interdire des importations ou des exportations pour une quelconque raison » tandis que la Loi sur la sécurité nationale permet à la Chine d’imposer des sanctions contre « les investissements étrangers, des articles spécifiques et des technologies majeures ainsi que sur des produits et services informatiques affectant ou pouvant affecter la sécurité nationale. »
L’UEL a été initiée en septembre 2020, même si une liste des désignations l’accompagnant n’a pas été publiée dans la foulée.
Tendances en matière de sanctions chinoises
En termes de réglementation financière, l’approche chinoise a toujours été perçue comme non coordonnée et inefficace. Cependant, depuis l’introduction de l’UEL et de mécanismes juridiques formalisés pour imposer des désignations, la politique de sanctions économiques de la Chine est devenue plus cohérente et répressive. Quelques-unes des principales mesures de sanctions récentes :
- Juillet 2020 : Sanctions annoncées à l’encontre de la Commission exécutive du Congrès américain sur la Chine et de plusieurs politiciens américains en réponse aux sanctions américaines contre la Chine en matière de violation des droits de l’homme.
- Août 2020 : Sanctions envers différentes personnalités américaines, y compris des sénateurs et des membres de la Chambre des représentants, en réponse aux sanctions américaines imposées à des responsables chinois accusés d’avoir porté atteinte au processus démocratique à Hong Kong.
- Octobre 2020 : Annonce de sanctions à l’encontre de plusieurs entités et responsables américains que la Chine estimait impliqués dans la vente d’armes à Taïwan.
- Décembre 2020 : Sanctions contre des responsables politiques américains non divulgués mais décrits par un porte-parole du gouvernement chinois comme étant des « responsables américains de l’Exécutif, des membres du Congrès et des ONG agissant de manière grotesque et largement impliqués dans les troubles à Hong Kong, ainsi que les membres de leur famille proche »
- Janvier 2021 : Sanctions contre 28 ressortissants britanniques et les membres de leur famille pour ingérence dans les affaires chinoises.
Sanctions récentes contre la Chine : En mars 2021, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Union européenne et le Canada ont imposé des sanctions envers de nombreux responsables et entités chinois en vertu de leurs régimes de sanctions respectifs concernant des violations des droits humains. Suite à ces sanctions occidentales, la Chine a réagi enprenant des sanctions issues de son propre programme et en ajoutant les désignations suivantes à sa liste de sanctions :
- 10 ressortissants et 4 entités de l’UE
- 9 ressortissants et 4 entités britanniques
- 2 ressortissants américains
- 1 entité et 1 ressortissant canadiens
Une déclaration du MOFCOM accompagnant les sanctions infligées aux désignations chinoises précisait que les personnes et entités visées avaient « gravement porté atteinte à la souveraineté et aux intérêts de la Chine et répandu de manière malveillante des mensonges et de la désinformation. »
Questions relatives à la région autonome ouïgoure du Xinjiang
L’approche de la Chine en matière de sanctions a été largement interprétée comme une réponse à ce qu’elle considère comme une ingérence dans ses affaires intérieures dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang (XUAR). Les sanctions chinoises font suite à des sanctions de grande envergure imposées par les États-Unis et d’autres pays envers des entreprises ayant des chaînes d’approvisionnement dans cette région. Elles reflètent aussi le mécontentement de Pékin face à ce qui est perçu comme une coordination internationale et un consensus contre sa politique intérieure.
Manifestations à Hong Kong
Entre mi-2020 et début 2021, les États-Unis et d’autres pays ont imposé des sanctions contre la Chine suite à la répression par les autorités chinoises de manifestations pro-démocratie à Hong Kong. Ces sanctions ont été accompagnées d’une modification de la liste BIS qui a désigné les exportations vers Hong Kong comme des exportations vers la République populaire de Chine et qui sont donc soumises à la Réglementation sur l’administration des exportations (EAR).
Suite aux sanctions américaines concernant Hong Kong et aux désignations de la liste BIS, la Chine a réagi en prononçant à son tour des sanctions à l’encontre d’un certain nombre de personnalités politiques américaines (voir la liste ci-dessus).
Loi chinoise contre les sanctions étrangères
En juin 2021, la Chine a promulgué une loi visant à bloquer les sanctions internationales ciblant ses entreprises nationales, en particulier celles imposées par les États-Unis et l’Union européenne. Également appelée « règles de blocage », la Loi chinoise contre les sanctions étrangères définit un fondement juridique permettant à la Chine de bloquer la portée internationale des sanctions secondaires imposées par des pays étrangers à un État tiers.
Ces règles de blocage sont un ajout de taille au régime de sanctions chinoises car elles ont été appliquées pour répondre directement aux sanctions secondaires américaines qui visent à interdire aux entreprises chinoises de commercer avec des entreprises implantées en Iran et en Corée du Nord. En vertu de cette nouvelle législation, les entreprises chinoises qui se soumettent aux sanctions imposées par des pays étrangers encourent des pénalités financières. Les règles de blocage s’inspirent du statut de blocage de l’UE qui a été introduit en 2018 pour interdire aux entreprises européennes de se conformer aux sanctions américaines contre l’Iran.
Dans le cadre de l’application de cette loi contre les sanctions étrangères, le MOFCOM s’assure que ces sanctions internationales sont légitimes avant de délivrer une ordonnance interdisant aux entreprises chinoises de s’y conformer. Pour statuer sur la légitimité des sanctions étrangères, le MOFCOM prend en compte :
- La violation potentielle du droit international par ces sanctions
- L’impact potentiel de ces sanctions sur la souveraineté chinoise
- L’impact de ces sanctions sur les droits des ressortissants chinois
Les entreprises chinoises qui essuient des pertes financières en se conformant aux Règles de blocage peuvent solliciter une indemnité auprès du gouvernement chinois. De même, les citoyens chinois peuvent poursuivre les entreprises implantées en Chine qui ne respectent pas ces Règles de blocage.
Sanctions chinoises : conséquences en termes de conformité LCB
En renforçant ses programmes de sanctions, en prenant des mesures à l’encontre de ressortissants et d’entités occidentales et en appliquant les sanctions prévues par les Règles de blocage, la Chine tente concrètement de mettre en place son propre régime mondial de sanctions.
Pour les établissements entretenant des relations commerciales en Occident et en Chine, cela signifie un paysage de conformité nettement plus complexe. Le vaste champ d’application de la Loi chinoise contre les sanctions étrangères contraint les établissements multinationaux à accorder une attention toute particulière aux sanctions chinoises et à tenir compte de leur exposition au risque à la fois dans les juridictions occidentales et en Chine. Il faut garder à l’esprit que la portée du régime de sanctions de la Chine ne se limite plus aux personnalités politiques. En effet, les sanctions chinoises d’octobre 2020 ont désigné les entreprises Lockheed Martin, Boeing Defense, Space & Security (BDS) et Raytheon sur la Liste d’entités non fiables dressée par la Chine.
Compte tenu de risques accrus en termes de conformité au niveau mondial, les établissements d’envergure internationale doivent tenir compte des sanctions chinoises dans le cadre de leur solution LCB. Les sanctions chinoises posent une série de nouveaux défis en matière de conformité. Les établissements doivent donc d’intégrer un outil logiciel de filtrage des sanctions qui tient compte des toutes dernières données sur la Chine et qui peut être configuré selon leur tolérance au risque. De même, une solution de filtrage des sanctions chinoises doit prendre en compte les caractères et les conventions de dénomination non occidentaux pour optimiser la précision et réduire le volume de faux positifs. Découvrez l’outil de filtrage des sanctions de ComplyAdvantage, une solution de données consolidées sur les sanctions chinoises qui s’appuie sur une technologie d’apprentissage automatique pour garantir une précision et une conformité constante.
Publié initialement 14 juin 2021, mis à jour 06 mars 2023
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